Bonjour, je me prĂ©sente, Jean Esposito masseur kinĂ©sithĂ©rapeute diplĂŽmĂ© Ă lâĂ©cole de Montpellier en 1986.
Cela fait 38 ans que je travaille Ă Lyon en cabinet libĂ©ral. Jâutilise trĂšs peu dâappareils jâai simplement une lampe infrarouge des ultrasons et des vĂ©los car jâaime bien travailler avec mes mains et rĂ©aliser des massages.
Jâai une orientation plutĂŽt de rhumatologie, traumatologie et neurologie. jâai rencontrĂ© beaucoup de rhumatologues qui mâadressent beaucoup de patients.
En 1986 quand jâai commencĂ© mon travail, jâai connu donc la premiĂšre nomenclature avec une quinzaine de cotations, des actes de rééducation qui durait 15 minutes 20 minutes 30 minutes 40 minutes 45 minutes du coup jâai pensĂ© que cela allait ĂȘtre trop compliquĂ© pour donner des rendez vous et donc jâai dĂ©cidĂ© de prendre un patient par demi heure pour avoir le temps de bien les traiter, avec des massages bien sĂ»r.
Vers lâan 2000, nous avons eu la deuxiĂšme nomenclature avec une nette simplification des cotations.
Dans mon cabinet, jâai toujours travaillĂ© avec 2 assistants collaborateur libĂ©raux, depuis 25 ans.
Il y a encore une dizaine dâannĂ©es, quand je mettais une annonce, je prĂ©cisais toujours, sĂ©ances individuelles de 30 minutes par patient et des massages.
La plupart du temps, jâavais 5 ou 6 kinĂ©sithĂ©rapeutes Ă qui cela convenait et donc jâavais le choix , ils correspondaient bien au profil.
Depuis 4, 5 ans, Ă ma grande surprise et aussi envahi dâune dĂ©ception importante, tous les jeunes kinĂ©s ou moins jeunes, me disent toujours pareil maintenant : Nous travaillons avec des plateaux techniques, par une rééducation dynamique et active et on prend 5 ou 6 patients en mĂȘme temps et quasiment pas de massage.
La rééducation dynamique et active, je connais bien: quand le patient est capable de réaliser les exercices que je lui propose devant moi sur la table ou sur un tapis au sol, tout va trÚs bien. Mais pour certaines rééducations, on utilise la mobilisation passive : et là , on me répond tout de suite : on place les patients sur la machine.
Et quand le patient a vraiment mal, on me dit que les massages ne servent plus Ă rien.
Triste nouvelle, je rĂ©ponds Ă cette jeune gĂ©nĂ©ration que vous ĂȘtes en train de dĂ©truire notre profession, que vous la dĂ©shumanisĂ©, que les patients sont livrĂ©s Ă eux-mĂȘmes, et que câest la rentabilitĂ© qui compte et non plus la conscience professionnelle de prendre le temps dâexpliquer, de rassurer, de rĂ©aliser notre travail de conseils et de soulager les patients.
Ma journĂ©e au cabinet, commence Ă 7h du matin, quelquefois Ă 6h30, et je termine Ă 19h voir 20h. Toujours pour la mĂȘme raison, pour bien traiter les patients par demie heure et ils apprĂ©cient Ă©normĂ©ment.
Je trouve que ces cabinets qui tournent avec 5 ou 6 patients par heure, sur des machines, cela deshumanise la relation professionnel-patients. Finalement le kiné ne travaille plus beaucoup.
Jâappelle cela de la machinothĂ©rapie, vous allez me dire que câest dans lâair du temps ! Bien triste Ă©poque !
De plus ces patients qui vont dans ces cabinets, ce nâest pas vraiment pour de rĂ©els soins de rhumatologie, ni de neurologie, mais plutĂŽt de lâentraĂźnement Ă lâeffort sur toutes sorte dâappareils un peu comme une salle de gymnastique mais finalement avec une ordonnance et remboursĂ© par la sĂ©curitĂ© sociale.
Actuellement je suis Ă la recherche dâun ou dâune collaboratrice mais aucun ne correspond Ă mon profil.
Il est pourtant bien stipulĂ© dans la convention signĂ©e avec la CNAM que la sĂ©ance doit ĂȘtre individuelle et doit durer 30 minutes avec des massages.
Rappelons que si nous avons perdu le monopole du massage, câest bien parce que petit Ă petit, les jeunes kinĂ©sithĂ©rapeutes ont dĂ©laissĂ© ce pan entier de notre profession, avec des manĆuvres tellement efficaces mais bien sĂ»r qui demande dâĂȘtre auprĂšs du patient.
Je ne suis contre le progrĂšs, loin de la, mais on a perdu la vraie valeur de notre profession qui est lâhumanisme et lâimportance de nos mains dans notre travail.
VoilĂ un rĂ©cit sur la rĂ©flexion sur notre profession que jâavais envi de partager avec le plus grand nombre dâentre vous.
Certains se reconnaĂźtront certainement dans ce que jâexplique et ce que je ressens.
Merci pour votre lecture.
Jean ESPOSITO.